Esclaves - Feuilleton Servannesque - Episode 1, 2, 3, 4 et 5

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Liza
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Re: Esclaves - Feuilleton Servannesque - Episode 1, 2, 3, 4 et 5

Message par Liza »

Tu vas réellement dans une île sans rien du tout ?

Je ne m'y ferai pas !
On ne me donne jamais rien, même pas mon âge !
 
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Liza
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Re: Esclaves - Feuilleton Servannesque - Episode 1, 2, 3, 4 et 5

Message par Liza »

Je ne suis pas certaine que cela m'amuserait, chacun ses goûts.
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Montparnasse
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Re: Esclaves - Feuilleton Servannesque - Episode 1, 2, 3, 4 et 5

Message par Montparnasse »

Prends quand même ta moustiquaire, des fois qu'il y ait des ours...

C'est dans quelle région ? chaude ou froide ?
Quand les Shadoks sont tombés sur Terre, ils se sont cassés. C'est pour cette raison qu'ils ont commencé à pondre des œufs.
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Liza
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Re: Esclaves - Feuilleton Servannesque - Episode 1, 2, 3, 4 et 5

Message par Liza »

J'ai navigué dans cette aventure. Je n'aime pas l'ancien temps parce qu'il ne comble pas ma curiosité il ne me donne aucun repère sur ce qui m'entoure aujourd’hui.

Mettre fin à sa vie pour ne plus subir le martyre, de cette façon non dissimulée, devrait donner l'étendue de la souffrance au bourreau. En ce temps-là, personne ne semblait avoir de conscience !

En a-t-on plus aujourd'hui lorsque, limité par un bracelet électronique, ne pouvant aller faire la guerre dans un autre pays, on la fait en France, dans une église.

En résumé, j'ai bien aimé ce journal de bord qui m'a permis de mieux situer le trafic d'êtres humains, sans me coltiner trois cents pages de détails que je n'arrive pas à situer.

Notre Imprévue écrite au débotté, sans aucune recherche ni réflexion doit te paraître bien fade. Je te rassure, je ne me lancerai jamais dans l’écriture de faits réels, je n’ai aucune patience pour les recherches. Et, comme je n’écris que des images que je connais pour lier mes récits, ils sont tous d’un moderniste effréné.
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Re: Esclaves - Feuilleton Servannesque - Episode 1, 2, 3, 4 et 5

Message par Liza »

Il ne faut pas retire, sinon les commentaires déposés par les uns et les autres n'ont plus de sujet.

Il y en a quelques uns que j'effacerais bien, mais cela, il faut y penser avant. Les douteux, (comme Hors mode) je demande conseil pour éviter la sortie de casseroles dans le futur.

Ma classe suffit à me émigrer ! Ils ne savent pas encore que je vais retourner à l'institut, pour la treizième année, mais avec un statut différent, je n'y suivrais plus les cours. Je le regrette, dans l'alternance il n'y a pratiquement plus de français, dommage. Je vais perdre ce que j'ai acquis.
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Re: Esclaves - Feuilleton Servannesque - Episode 1, 2, 3, 4 et 5

Message par Liza »

Mon oreille patine dès ce matin, grave !

Je ne retire jamais rien, ce qui est écrit est écrit, toutefois je m'entoure de prudence dans mes mots.
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Dona
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Re: Esclaves - Feuilleton Servannesque - Episode 1, 2, 3 et 4

Message par Dona »

Servanne a écrit :Cinquième et avant-dernière partie

Le courroux de la mer a cessé. Il pleut depuis plusieurs jours sur l’océan et les blancs n’ont pas vidé les seaux à déjection. Le contenu des bailles renversées a coulé sur les planches pour se mêler aux vomissures. L’odeur est devenue maintenant insupportable. Des enfants sont tombés dans les seaux hygiéniques et ont manqué de suffoquer dans les immondices. Je veux revoir le ciel et ses merveilles, sortir de ces profondeurs puantes. Je me suis recroquevillée dans mon coin, tête basse et mâchoire serrée, car le démon du désespoir m’a possédée et je ne veux pas le montrer aux autres. Dans ma tête, je proclame des obscénités envers les blancs comme pour faire taire le ricanement du bois qui grince et accentue notre tragédie.


† † †

Journal de bord, le onzième d'octobre de l'an 1768
Après la tempête, la pluie.
Elle tombe depuis trois jours. Cloitrée dans ma cabine, j’écoute les rafales de l’averse qui cinglent les voiles, et les marins de quart pousser des jurons tonitruants dans leur langues natales, qui, en portugais, qui en breton, qui en flamand. Il pleut également dans mon âme. Il m’est impossible de retenir ces larmes intérieures. Trop de questionnements. L’avenir était-il plus beau hier ? Ai-je le droit de m’éprendre ? Si on ne peut trouver le bonheur en soi à quoi sert de le chercher ailleurs ? Je ne peux que surseoir à tout cela et penser à mes devoirs. Le cœur me faut, alors l’esprit survole. Je m'arc-boute à cette dernière pensée et décide d’aller marcher un peu.
Je trouve mon père dans l’amphithéâtre, (quel amphithéâtre ?) affairé à nettoyer au vinaigre ses ustensiles de chirurgie. Je lui demande si son office à bord le contente. Il me répond que la majeure partie de son travail consiste à masquer les lésions cutanées et les blessures de fouet. Les esclaves marqués se vendent nettement moins bien aux enchères. Il se gratte la tête et me regarde d’un air accaparé.
— Tout ce qui compte, Adélaïde, c’est de sauver le manoir et de pouvoir nourrir nos gens.
— Je ne saurais en disconvenir, père, cependant l’an prochain je mettrai en noces le vicomte de Consigny, l’argent ne sera plus un problème.
— On a son honneur, ma fille, ta douaire sera tienne, ça serait tirer sa poudre aux moineaux pour moi que de compter dessus. Le domaine doit se suffire à lui-même, si je n’y parviens pas, c’est que je ne suis pas digne du travail de nos ancêtres.
— Nous en reparlerons à notre retour. Pensez-vous que mère et Jeanne sauront faire face aux circonstances pendant votre absence ?
— Assurément, ta mère est une femme de devoir et de caractère. Quant à ta sœur, malgré son jeune âge, elle est vigoureuse et volontaire. J’ai entière confiance en elles et j’ai laissé assez de liquidités pour qu’elles puissent parer aux plus impérieuses nécessités. Au pire, j’ai cédé à ta mère procuration pour vendre les Longs Marais en cas d’infortune.
— Pas les Longs Marais, père ! C’était la parcelle préférée d’oncle Robert !
— Dieu ait son âme… J’y suis aussi attaché que feu mon frère, Adélaïde, cependant c’est aussi la terre qui nous rapporte le moins. J’espère que nous n’en arriverons pas là.
— Moi non plus.
— Ma fille ?
— Oui, père ?
— Il faut que je t’entretienne d’un sujet. J’ai ouï-dire par monsieur de Tremarec et l’abbé Mariani que tu les aurais encore assommés de questions concernant les nègres.
— C’est que je suis bavarde comme une pie et que le sujet m’intéresse.
— Je ne t’en blâme pas. Toutefois ce ne sont pas là des sujets d’études convenables pour une future vicomtesse.
— Et pourquoi cela ?
Mon père hausse les épaules.
— A quoi bon s’y intéresser ? Montesquieu dit que les nègres n'ont pas le sens commun, ils font plus de cas d'un collier de verre que de l'or, qui, chez les nations policées, est d'une si grande conséquence. Il est impossible que nous supposions que ces gens-là soient des hommes; parce que, si nous les supposions des hommes, on commencerait à croire que nous ne sommes pas nous-mêmes chrétiens.
— C’est donc qu’il s’interroge aussi sur les justes fondements de sa foi ?
— Oui… mais le bon baron dit aussi qu’on ne peut se mettre dans l'esprit que Dieu, qui est un être très sage, ait mis une âme, surtout une âme bonne, dans un corps tout noir.
— La barbe avec votre monsieur de Montesquieu à la fin ! C’est un esprit sec et rigide.
— Peut-être, néanmoins tes jugements sont encore trop passionnés et ta langue bien trop prompte, ma fille. Lorsque l’âge aura refroidi ta tête ton esprit, tu cesseras de te chiffonner la cervelle pour des questions qui ne sont pas de prime importance.
— Alors je souhaite que cet âge ne vienne jamais !
Agacée, je tourne les talons. La voix acerbe du capitaine qui vient d’entrer, me poursuit dans la coursive.
— Entendez votre géniteur, c’est un homme de raison aux saines lectures, de petits esprits exagèrent trop l'injustice que l'on fait aux Africains. Car, si elle était telle qu'ils le disent, ne serait-il pas venu dans la tête des princes d'Europe, qui font entre eux tant de conventions inutiles, d'en faire une générale en faveur de la miséricorde et de la pitié ?
— Sac à vin, dis-je en un murmure avant de m’enfuir vers ma cabine.

La pluie a encore forci et la majeure partie de l’équipage est cantonnée à ses quartiers. Les quarts ont été raccourcis au strict nécessaire. Je n’ai pas vu Erwan depuis trois jours et cela m’empèse le cœur.


† † †


Ce que je redoutais tant est arrivé.
Le porc blanc a jeté son dévolu sur ma personne. Deux marins veulent se saisir de moi. Je refuse et m’accroche à la poutre où je m’adosse. Le barbu gronde et m’attrape par le poignet. Je le mords au bras de toutes mes forces. Il me lâche et vocifère comme un pourceau. Il est furieux, il cogne pour faire mal. Son coup de poing m'éclate la lèvre et me rejette en arrière. Je le dévisage en essuyant d'un revers de la main le sang de ma bouche avant de lui cracher au visage. Il empoigne son fouet. Le premier coup me cingle les cuisses. Le deuxième m’ensanglante l'épaule. Je réussis à agripper la lanière. Je tire dessus jusqu'à m'accrocher au manche. Mon pied vise l’entrejambe mais je suis trop lente, trop fatiguée pour espérer le surprendre. Il bloque ma jambe et me frappe à la poitrine. Mon visage heurte la poutre. Je ne sens même pas le choc. Il faut que j'arrive à me remettre sur mes pieds. Une nouvelle pluie de coups de fouet s’abat sur moi. Je me recroqueville en boule sous l’averse. Ma peau me brûle à maints endroits. Il finit par s’arrêter. Les deux autres me soulèvent et m’emportent hors du parc. Je suis jetée comme un sac sur une table. Le barbu referme le loquet derrière lui.
— Essaye de gueuler et j’t’envoie au trépas…
Il parle bien que je ne comprenne pas sa langue. Il essaye d’écarter mes jambes. Je refuse une nouvelle fois. Il me tord le bras et quelque chose craque dans mon articulation. L'onde de souffrance est si aiguë qu’elle me monte au cœur et j’ai envie de vomir. Des points noirs se mettent à danser devant mes yeux. Il ne faut surtout pas que je m’évanouisse sinon il me tuerait. Je prends appui sur mon bras valide pour parvenir tant bien que mal à m’agenouiller. Je cherche encore un moyen de le surprendre, mais mon épaule me fait trop souffrir et j’ai autant de mal à respirer qu’un poisson jeté sur la rive qui cherche de l’air. Le porc passe sa main sous mon ventre pour me relever le bassin. Je me cambre malgré moi et il commence à me mettre des claques violentes sur le derrière. Je n'ai aucune réaction. Chacune de ces frappes est autant de coups portés à mon amour-propre mais il est hors de question de lui offrir la satisfaction de m’entendre gémir. Il force l'entrée de mon intimité et je ferme les yeux sous la douleur. Et cette fois-ci, je me mets à pleurer à chaudes larmes. Je ne peux les retenir. Pas parce que j'ai peur, pas parce que j'ai mal. Parce que j'ai failli.



† † †


Journal de bord, le dix-septième d’octobre de l'an 1768

Le soleil est enfin revenu.
Je finis de m’habiller en jetant un regard par la fenêtre de ma cabine. Le bleu intense du ciel dessine une immense frontière avec le gris pâle des flots. La mer soulève ses vagues impérieuses en rouleaux écumeux et je me sens comme écrasée par la majesté de son ample mouvement. La Marie-Céleste lavée par les pluies incessantes de ces jours derniers, semble recouverte d’un voile opalin ce matin. L’air salin et douceâtre s’insinue par tous les pores de ma peau et m’incite à cesser mes rêveries. J’ai dormi jusque fort tard. J’ai beaucoup songé la nuit dernière pour chercher des éclaircissements à ce qui demeure obscur dans mon esprit. J’ai crainte que les sentiments que je pense élevés ne soient embellis par les situations et la proximité. Peut-être aussi que le chemin tracé pour moi est trop propre et sans surprise. Père dit que l’ambition tue souvent l’amour. Ma seule ambition est de sauver ma famille du désastre financier. Mon paysage intérieur s’est modifié comme une tapisserie qui s’effrange sous l’usure du temps, mais j’accomplirai mes devoirs et mes promesses, même si le visage d’Erwan emplit constamment mes pensées. Cette dépendance me met un peu en colère contre moi-même.


† † †


J’ai fini par oublier mon nom.
La force de mon esprit et de mes muscles ont dépéri. Je ne peux plus me servir de mon bras droit. Je saigne en dehors, je saigne en dedans. Je ne supporte plus les hurlements des femmes devenues folles et les gémissements de celles qui prient dans le vide. Je voudrais que tout s’arrête. Ne plus respirer, ne plus entendre, ne plus voir ce qu’il se passe autour de moi, chasser l’effroi de ces images qui me hantent, faire cesser cette vie que je n’ai pas choisie et qui n’est plus que supplices et douleurs. Je me croyais façonnée dans du bois brut, capable d’absorber tous les chocs. Le porc barbu m’a prouvé le contraire.
À quoi bon continuer ? Je suis morte. Deux fois morte. Au moment où ils m’ont arrachée à ma terre et avant-hier. Demain, ils nous remonteront au pont pour les soins et lavements. Je ne redescendrai pas ici. Je ne peux plus.



J'ai vu quelques erreurs (je les ai soulignées). Quelle est cette histoire d'amphithéâtre ? Je n'ai pas compris...

Une remarque : j'ai cru que c'était Adélaïde qui se faisait violer.... Il faudrait que tu marques davantage la séparation entre ces deux prises de paroles (le gras pour Adélaïde et les italiques pour Safara)
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Re: Esclaves - Feuilleton Servannesque - Episode 1, 2, 3, 4 et 5

Message par Dona »

Je pense qu'il est nécessaire de mettre en guillemets les propos de Montesquieu puisqu'ils sont cités sans modification.
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Re: Esclaves - Feuilleton Servannesque - Episode 1, 2, 3, 4 et 5

Message par Dona »

J'ai du mal avec ça... avec les propos de Montesquieu. Montesquieu a écrit une satire, c'est ironique, tout est antiphrase, il faut entendre ce texte à l'envers, aucun des arguments (des esclavagistes) n'est en réalité recevable. C'est ce que l'auteur dénonce.
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Dona
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Re: Esclaves - Feuilleton Servannesque - Episode 1, 2, 3, 4 et 5

Message par Dona »

Donc, quand la capitaine dit ceci : " — Entendez votre géniteur, c’est un homme de raison aux saines lectures, de petits esprits exagèrent trop l'injustice que l'on fait aux Africains. Car, si elle était telle qu'ils le disent, ne serait-il pas venu dans la tête des princes d'Europe, qui font entre eux tant de conventions inutiles, d'en faire une générale en faveur de la miséricorde et de la pitié ? ", tu veux sous-entendre qu'il est très bête parce qu'il n'a pas compris le texte de Montesquieu ? Mais à l'époque, tout le monde connaissait le père de l'Encyclopédie et l'ampleur de ses idées réactionnaires, ce n'est pas crédible ce propos du capitaine...

edit : ah ! et je vois que Montparnasse a fait la même réflexion que moi... Il faudrait retravailler ce passage, je pense...

Sinon : top là pour l'écriture ! C'est très bien écrit, le lexique est toujours aussi recherché, bravo Servane ! :super:
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