Mardi 13 décembre, je suis allée voir : "Dom Juan" de Molière mis en scène par JEAN-FRANÇOIS SIVADIER
De Molière à Mozart, de scandales en fascination, l’histoire du « grand seigneur méchant homme » a pris la tournure d’un mythe libertaire. Dom Juan enlève les nobles dames, séduit les paysannes, renie l’amour filial et finit foudroyé par la statue du commandeur. Mais ce résumé ne révèle rien : le libertin qui revendique son droit au blasphème, à l’infidélité et à l’irrespect reste insaisissable. Son insoumission, même punie, est flamboyante et attirante. Dès le début, son lâche valet Sganarelle nous prévient : son maître est « le plus grand scélérat » doté d’un cœur « à aimer toute la terre ». Alors qui est-il vraiment ? Un grand idéaliste, un petit vaniteux ? Rien qu’un homme en somme ? En s’attachant à l’ambivalence du héros, Jean-François Sivadier saisit la vitalité des désirs et l’impuissance politique qui caractérisent l’impatiente jeunesse, quel que soit son siècle.
Ca a été un succès. La salle était bondée et pleine à moitié de lycéens. J'ai été heureuse de savoir qu'un jeune public voyait cette pièce parce que je me suis dit que lorsqu'on voit ce genre de pièces à 15 ans, on a aura toujours envie de revenir au théâtre !
La scénographie n'a économisé sur aucun moyen pour mettre en valeur les péripéties de la pièce. Pour reproduire "la pièce à machines", révolutionnaire à l'époque de Molière, le metteur en scène n'a pas lésiné sur les procédés tels que : voiles de navire (pour évoquer le naufrage de Dom Juan), de voiles qu'on manoeuvre pour les afficher sur scène ou au contraire changer de décor, neige artificielle et effets sonores (pour la tempête en mer), statues géantes, lumières sépulcrales ( lors de la découverte du tombeau du Commandeur) etc... En haut du rideau était affiché un compteur... Beaucoup de gens se sont interrogés sur son utilité... et puis on a fini par comprendre : les chiffres décroissaient à chaque mention du mot "Ciel" et ce terme est vraiment très présent dans la pièce. A "zéro", on peut s'attendre à la chute infernale du protagoniste.
Autre découverte : le jeu des paysans Charlotte, Pierrot et Mathurine, modernisés dans leurs vêtements et jeu dramatique mais fidèles au texte d'époque. Le valet Sganarelle a été parfait (c'est aussi le premier rôle). Dom Juan (superbement joué) nous laisse toujours, depuis plus de trois siècles, sur notre faim... Le dénouement en apothéose, même mérité, laisse le spectateur en proie aux éternelles questions : jusqu'où Dom Juan n'a-t-il pas raison?
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