Page 44 sur 58
Re: Poésies (mont)parnassiennes
Publié : 12 janvier 2017, 18:37
par Montparnasse
Liza a écrit :Zut, il vont couper le réseau à la edemande d'Orange à cause de l'orage... et désespoir !
Lis vite « Le Voyage » et bonne chance dans la tempête ! Bises, à bientôt !.........
Re: Poésies (mont)parnassiennes
Publié : 19 janvier 2017, 19:17
par Montparnasse
Je poursuis mon voyage poétique du côté de saturne et Verlaine ; plus tard j'irai où mon cœur me mène.
NEVERMORE
Souvenir, souvenir, que me veux-tu ? L’automne
Faisait voler la grive à travers l’air atone,
Et le soleil dardait un rayon monotone
Sur le bois jaunissant où la bise détone.
Nous étions seul à seule et marchions en rêvant,
Elle et moi, les cheveux et la pensée au vent.
Soudain, tournant vers moi son regard émouvant :
« Quel fut ton plus beau jour ! » fit sa voix d’or vivant,
Sa voix douce et sonore, au frais timbre angélique.
Un sourire discret lui donna la réplique,
Et je baisai sa main blanche, dévotement.
— Ah ! les premières fleurs qu’elles sont parfumées !
Et qu’il bruit avec un murmure charmant
Le premier oui qui sort de lèvres bien-aimées !
(P. Verlaine, Poèmes saturniens, 1866)
Re: Poésies (mont)parnassiennes
Publié : 19 janvier 2017, 19:19
par Montparnasse
APRÈS TROIS ANS
Ayant poussé la porte étroite qui chancelle,
Je me suis promené dans le petit jardin
Qu’éclairait doucement le soleil du matin,
Pailletant chaque fleur d’une humide étincelle.
Rien n’a changé. J’ai tout revu : l’humble tonnelle
De vigne folle avec les chaises de rotin…
Le jet d’eau fait toujours son murmure argentin
Et le vieux tremble sa plainte sempiternelle.
Les roses comme avant palpitent ; comme avant,
Les grands lys orgueilleux se balancent au vent.
Chaque alouette qui va et vient m’est connue.
Même j’ai retrouvé debout la Velléda,
Dont le plâtre s’écaille au bout de l’avenue.
— Grêle, parmi l’odeur fade du réséda.
(P. Verlaine, Poèmes saturniens, 1866)
Re: Poésies (mont)parnassiennes
Publié : 22 janvier 2017, 17:12
par Montparnasse
J'ai déjà mis VŒU dans ce fil. Je passe au suivant :
LASSITUDE
A batallas de amor campo de pluma.
(Gongora.)
De la douceur, de la douceur, de la douceur !
Calme un peu ces transports fébriles, ma charmante.
Même au fort du déduit, parfois, vois-tu, l’amante
Doit avoir l’abandon paisible de la sœur.
Sois langoureuse, fais ta caresse endormante,
Bien égaux tes soupirs et ton regard berceur.
Va, l’étreinte jalouse et le spasme obsesseur
Ne valent pas un long baiser, même qui mente !
Mais dans ton cher cœur d’or, me dis-tu, mon enfant,
La fauve passion va sonnant l’oliphant
Laisse-la trompetter à son aise, la gueuse !
Mets ton front sur mon front et ta main dans ma main,
Et fais-moi des serments que tu rompras demain,
Et pleurons jusqu’au jour, ô petite fougueuse !
(P. Verlaine, Poèmes saturniens, 1866)
Notes
A batallas de amor campo de pluma. : Batailles d'amour, combats de plumes.
Déduit : Divertissement. Jeux amoureux.
Oliphant : Cor d'ivoire, taillé dans une défense d'éléphant, dont les chevaliers se servaient à la guerre ou à la chasse.
Re: Poésies (mont)parnassiennes
Publié : 22 janvier 2017, 17:20
par Montparnasse
MON REVE FAMILIER est déjà dans ce fil, je passe au suivant :
À UNE FEMME
À vous ces vers, de par la grâce consolante
De vos grands yeux où rit et pleure un rêve doux,
De par votre âme, pure et toute bonne, à vous
Ces vers du fond de ma détresse violente.
C’est qu’hélas ! le hideux cauchemar qui me hante
N’a pas de trêve et va furieux, fou, jaloux,
Se multipliant comme un cortège de loups
Et se pendant après mon sort qu’il ensanglante.
Oh ! je souffre, je souffre affreusement, si bien
Que le gémissement premier du premier homme
Chassé d’Éden n’est qu’une églogue au prix du mien !
Et les soucis que vous pouvez avoir sont comme
Des hirondelles sur un ciel d’après-midi,
— Chère, — par un beau jour de septembre attiédi.
(P. Verlaine, Poèmes saturniens, 1866)
Notes
Eglogue : Petit poème pastoral ou champêtre.
Re: Poésies (mont)parnassiennes
Publié : 22 janvier 2017, 20:27
par Liza
« Chassé d’Éden n’est qu’une églogue au prix du mien. »
Je ne connaissais pas églogue !
Re: Poésies (mont)parnassiennes
Publié : 24 janvier 2017, 18:57
par Montparnasse
Un poème très baudelairien pour un auteur qui, je crois, n'aimait pas la poésie de Baudelaire :
L’ANGOISSE
Nature, rien de toi ne m’émeut, ni les champs
Nourriciers, ni l’écho vermeil des pastorales
Siciliennes, ni les pompes aurorales,
Ni la solennité dolente des couchants.
Je ris de l’Art, je ris de l’Homme aussi, des chants,
Des vers, des temples grecs et des tours en spirales
Qu’étirent dans le ciel vide les cathédrales,
Et je vois du même œil les bons et les méchants.
Je ne crois pas en Dieu, j’abjure et je renie
Toute pensée, et quant à la vieille ironie,
L’Amour, je voudrais bien qu’on ne m’en parlât plus.
Lasse de vivre, ayant peur de mourir, pareille
Au brick perdu jouet du flux et du reflux,
Mon âme pour d’affreux naufrages appareille.
(P. Verlaine, Poèmes saturniens, 1866)
Re: Poésies (mont)parnassiennes
Publié : 24 janvier 2017, 19:07
par Montparnasse
CROQUIS PARISIEN
La lune plaquait ses teintes de zinc
Par angles obtus.
Des bouts de fumée en forme de cinq
Sortaient drus et noirs des hauts toits pointus.
Le ciel était gris, la bise pleurait
Ainsi qu’un basson.
Au loin, un matou frileux et discret
Miaulait d’étrange et grêle façon.
Moi, j’allais, rêvant du divin Platon
Et de Phidias,
Et de Salamine et de Marathon,
Sous l’œil clignotant des bleus becs de gaz.
(P. Verlaine, Poèmes saturniens, 1866)
Notes
Phidias : (Athènes, -490 – Olympie, -430), est un sculpteur du premier classicisme grec. Il est l'auteur d'une Athéna Parthénos dont une copie a été conservée (Athéna dite du Varvakeion).
Salamine : Ile de Grèce, dans le golfe Saronique, séparée de la côte attique par un détroit.
Marathon : Ville du Nord-Est de l'Attique (Grèce).
Re: Poésies (mont)parnassiennes
Publié : 24 janvier 2017, 20:35
par Liza
Marathon : Ville du Nord-Est de l'Attique (Grèce).
Le nom marathon pour la course, vient-il de cette ville ?
Re: Poésies (mont)parnassiennes
Publié : 24 janvier 2017, 21:52
par Montparnasse
Oui, certainement.