Le trou
Publié : 30 septembre 2016, 19:10
Le trou
— Je ne souhaite pas te vexer, je te le dis gentiment, ton pantalon est troué.
— On me l’a déjà dit, tu vois mes ours, ce n’est pas grave.
— Des ours ? Mais non, un peu de blanc, c’est tout !
— Quand la fenêtre s’ouvrira plus grande, tu verras les nounours qui la parsèment.
— Tu portes des culottes avec des nounours… comme les gosses !
— Eh, je suis victime de ton dédain, c’est ta faute !
— Ma faute, tu rêves, chacun ses goûts, affirme la fille sans trou.
— Ne viens-tu pas de l’avouer à ton âge tu ne portes plus de culottes décorées de nounours, de chats ou de petits cœurs.
La fille réfléchit, certes, elle ne porte plus de sous-vêtements enfantins, toutefois, de quelle façon, cela la rend responsable du choix de son amie. Elle questionne carrément :
— Tu peux m’expliquer en quoi suis-je responsable de ton choix ?
— Ce n’est pas mon choix, je suis victime du goût de chic des filles modernes comme toi, tout simplement.
— Je comprends de moins en moins. Que viennent faire les goûts de chic dans le trou de ton pantalon ?
— Dans le trou, rien ! Dans ce que l’on voit au travers, tout !
— Je suis larguée. Même en réfléchissant, je ne trouve aucun rapport. Je ne suis pas plus bête que toi !
— Certes non, tu ne penses pas au bon endroit, c’est tout.
— Tu mets un jeans pas troué et c’est fini, nous n’en parlons plus !
— Facile à dire. Avec ces culottes hautes, si tu ne vois pas le sourire du plombier, tu as une idée très précise du décor, regarde, propose la trouée en se mettant à genoux comme le déboucheur d’évier.
— Effectivement les nounours rouges sont voyants. Je ne comprends toujours pas ?
— Comme tes amies, tu achètes des cache pots minima, en coton, en dentelle ou je ne sais quoi. Résultat, les grandes tailles en nounours sont invendues.
— C’est vrai, les âges quatorze ou seize ans doivent se vendre difficilement, mais…
— Tu as tout compris, je suis victime d’un appel d’offres, affirme la trouée comme si cela était clair pour tout le monde, et encore plus évident pour son amie.
— On t’a fait des offres, pour quoi faire? Reboucher ton trou ? Sans blague ?
La trouée rigole un bon coup, afin de détendre la situation, amusée par l’ignorance de son amie sur le fonctionnement des achats des collectivités !
— Mais non, soit sérieuse un instant. L’aide sociale à l’enfance n’est pas riche, elle achète les fournitures les moins chères pour les orphelins, tu t’en doutes…
— On tire les prix par le bas, c’est vrai. Je ne vois toujours pas le rapport avec les ours sur tes fesses.
— Il est limpide, les invendus, que les filles comme toi n’achètent pas, sont mis de côté et proposés dans les appels d’offres, le chemin le plus direct pour arriver là où tu les vois, c'est-à-dire sur moi !
— Cela ne fait pas riche, tu as l’air de t’en ficher…
— Comme de… j’allais dire de ma première petite culotte. Je m’en fiche royalement.
— D’autres vêtements viennent de ces appels au rabais ?
— Presque tous, ce n’est pas très solide et souvent démodé. Le principal étant de rester décente un trou par ici ou par là ne dépare pas. Baudelaire parle du charme des guenilles combien plus attirantes que les habits de cour ! Si, par les trous on admire mes dessous, suis-je fautive de ces regards coquins ?
— Ben, non, tu n’y es pour rien !
— Ne dit-on pas que l’on ne regarde que ce qui est beau ? J’en déduis que j’ai un beau trou et si cela continue, on verra le trou… de mon fond de culotte usé sur les pupitres mal équarris d’un vieux pensionnat.
— Finalement, tu ne montres rien !
— Non, j’attire ! Ne pouvant me hausser dans le monde avec de rutilants sous-vêtements, j’y fais mon trou en laissant apercevoir la vérité : sous couvert de misère, le voile cache souvent la beauté.
— Où cours-tu mon amie, tu sembles bien pressée.
— Acheter un jeans troué !
Liza
— Je ne souhaite pas te vexer, je te le dis gentiment, ton pantalon est troué.
— On me l’a déjà dit, tu vois mes ours, ce n’est pas grave.
— Des ours ? Mais non, un peu de blanc, c’est tout !
— Quand la fenêtre s’ouvrira plus grande, tu verras les nounours qui la parsèment.
— Tu portes des culottes avec des nounours… comme les gosses !
— Eh, je suis victime de ton dédain, c’est ta faute !
— Ma faute, tu rêves, chacun ses goûts, affirme la fille sans trou.
— Ne viens-tu pas de l’avouer à ton âge tu ne portes plus de culottes décorées de nounours, de chats ou de petits cœurs.
La fille réfléchit, certes, elle ne porte plus de sous-vêtements enfantins, toutefois, de quelle façon, cela la rend responsable du choix de son amie. Elle questionne carrément :
— Tu peux m’expliquer en quoi suis-je responsable de ton choix ?
— Ce n’est pas mon choix, je suis victime du goût de chic des filles modernes comme toi, tout simplement.
— Je comprends de moins en moins. Que viennent faire les goûts de chic dans le trou de ton pantalon ?
— Dans le trou, rien ! Dans ce que l’on voit au travers, tout !
— Je suis larguée. Même en réfléchissant, je ne trouve aucun rapport. Je ne suis pas plus bête que toi !
— Certes non, tu ne penses pas au bon endroit, c’est tout.
— Tu mets un jeans pas troué et c’est fini, nous n’en parlons plus !
— Facile à dire. Avec ces culottes hautes, si tu ne vois pas le sourire du plombier, tu as une idée très précise du décor, regarde, propose la trouée en se mettant à genoux comme le déboucheur d’évier.
— Effectivement les nounours rouges sont voyants. Je ne comprends toujours pas ?
— Comme tes amies, tu achètes des cache pots minima, en coton, en dentelle ou je ne sais quoi. Résultat, les grandes tailles en nounours sont invendues.
— C’est vrai, les âges quatorze ou seize ans doivent se vendre difficilement, mais…
— Tu as tout compris, je suis victime d’un appel d’offres, affirme la trouée comme si cela était clair pour tout le monde, et encore plus évident pour son amie.
— On t’a fait des offres, pour quoi faire? Reboucher ton trou ? Sans blague ?
La trouée rigole un bon coup, afin de détendre la situation, amusée par l’ignorance de son amie sur le fonctionnement des achats des collectivités !
— Mais non, soit sérieuse un instant. L’aide sociale à l’enfance n’est pas riche, elle achète les fournitures les moins chères pour les orphelins, tu t’en doutes…
— On tire les prix par le bas, c’est vrai. Je ne vois toujours pas le rapport avec les ours sur tes fesses.
— Il est limpide, les invendus, que les filles comme toi n’achètent pas, sont mis de côté et proposés dans les appels d’offres, le chemin le plus direct pour arriver là où tu les vois, c'est-à-dire sur moi !
— Cela ne fait pas riche, tu as l’air de t’en ficher…
— Comme de… j’allais dire de ma première petite culotte. Je m’en fiche royalement.
— D’autres vêtements viennent de ces appels au rabais ?
— Presque tous, ce n’est pas très solide et souvent démodé. Le principal étant de rester décente un trou par ici ou par là ne dépare pas. Baudelaire parle du charme des guenilles combien plus attirantes que les habits de cour ! Si, par les trous on admire mes dessous, suis-je fautive de ces regards coquins ?
— Ben, non, tu n’y es pour rien !
— Ne dit-on pas que l’on ne regarde que ce qui est beau ? J’en déduis que j’ai un beau trou et si cela continue, on verra le trou… de mon fond de culotte usé sur les pupitres mal équarris d’un vieux pensionnat.
— Finalement, tu ne montres rien !
— Non, j’attire ! Ne pouvant me hausser dans le monde avec de rutilants sous-vêtements, j’y fais mon trou en laissant apercevoir la vérité : sous couvert de misère, le voile cache souvent la beauté.
— Où cours-tu mon amie, tu sembles bien pressée.
— Acheter un jeans troué !
Liza