Retraite
Publié : 26 décembre 2016, 20:56
Retraite
Une dernière visite médicale et on me pousse vers la retraite. Je ne suis pas fatiguée. Je n’ai jamais travaillé dans l’urgence. J’ai passé mon temps à chouchouter des enfants cassés. À veiller à leur confort avec délicatesse et compassion. Pauvres gamins, le plus souvent victimes de l’imprudence des parents ou d’imbéciles comportements de personnes que l’on dit adultes et raisonnables.
Dans le travail, nous devons garder nos distances afin de nous préserver de l’attachement. Facile à dire, je fonds devant la souffrance des petits, je suis presque insensible à celle des grands. Je me fais câline pour rouler ces fracassés ici et là sans embarras.
Celui-ci, victime d’un capot sur un passage clouté au vert. Éparpillés les os du gosse. Quelques excuses du chauffard, à mots couverts, ne les recolleront pas. La gentillesse et la prudence que je lui apporte en ouvrant toutes grandes les portes ne compte pas ? L’assurance, dit-on, payera les dégâts.
Ma vie passée à veiller sur les petits ne m’a pas empêchée de vieillir. Petit à petit, d’un petit à l’autre, comment pourrai-je m’exprimer autrement. Ne suis-je pas encore jolie dans ma tenue blanche ? Je n’ai jamais utilisé ma rampe illuminée pour aller d’un service à l’autre, ni fait crier l’urgence d’une voix forte pour chasser les badauds de pressant en cohortes. Un travail paisible a ménagé mes entournures, je n’ai pas de courbatures. Malgré cela, la retraite m’attend, c'est comme une rupture.
Mon but premier ne pouvant accomplir. Que vais-je devenir maintenant que je ne peux plus servir ? Va-t-on retirer l'étiquette de la glace arrière Transport d’enfants pour afficher Transport d’animaux vivants ? C'est, paraît-il, le meilleur porte-manteaux possible pour les chapeaux bleus des ambulances réformées.
Liza
Une dernière visite médicale et on me pousse vers la retraite. Je ne suis pas fatiguée. Je n’ai jamais travaillé dans l’urgence. J’ai passé mon temps à chouchouter des enfants cassés. À veiller à leur confort avec délicatesse et compassion. Pauvres gamins, le plus souvent victimes de l’imprudence des parents ou d’imbéciles comportements de personnes que l’on dit adultes et raisonnables.
Dans le travail, nous devons garder nos distances afin de nous préserver de l’attachement. Facile à dire, je fonds devant la souffrance des petits, je suis presque insensible à celle des grands. Je me fais câline pour rouler ces fracassés ici et là sans embarras.
Celui-ci, victime d’un capot sur un passage clouté au vert. Éparpillés les os du gosse. Quelques excuses du chauffard, à mots couverts, ne les recolleront pas. La gentillesse et la prudence que je lui apporte en ouvrant toutes grandes les portes ne compte pas ? L’assurance, dit-on, payera les dégâts.
Ma vie passée à veiller sur les petits ne m’a pas empêchée de vieillir. Petit à petit, d’un petit à l’autre, comment pourrai-je m’exprimer autrement. Ne suis-je pas encore jolie dans ma tenue blanche ? Je n’ai jamais utilisé ma rampe illuminée pour aller d’un service à l’autre, ni fait crier l’urgence d’une voix forte pour chasser les badauds de pressant en cohortes. Un travail paisible a ménagé mes entournures, je n’ai pas de courbatures. Malgré cela, la retraite m’attend, c'est comme une rupture.
Mon but premier ne pouvant accomplir. Que vais-je devenir maintenant que je ne peux plus servir ? Va-t-on retirer l'étiquette de la glace arrière Transport d’enfants pour afficher Transport d’animaux vivants ? C'est, paraît-il, le meilleur porte-manteaux possible pour les chapeaux bleus des ambulances réformées.
Liza