Les gamins du village allaient, pour rigoler,
Derrière la colline, au lavoir des abbesses,
Et guettaient les amants qui croyaient s’isoler.
Ils y ont aperçu de bien tendres caresses,
Cachés dans les fougères, écarquillant les yeux,
Ils y ont entendu les plus belles promesses
Et surpris des baisers plus ou moins audacieux.
Puis vint ce bel été où, privé de vacances,
Je fus le seul enfant à traîner au village,
Aux fêtes du quinze aout, j’allai tenter ma chance,
Et courus au lavoir, l’humeur un peu volage.
Attendant au soleil où ma peau sans défense,
Prenait le ton carmin qui sied aux écrevisses,
Inconscient, je vivais la fin de mon enfance,
Puis le destin m’ouvrit la porte des délices.
J’ai gravé cette scène en ses moindres détails
Au marbre dont on fait les plus belles mémoires.
Jamais je n’oublierai la fille à l’éventail,
Mais je garde pour moi la fin de cette histoire…
